En guise d'Editorial
L'Ecriture une raison de vivre
J'ai commencé à écrire vers neuf ans, un roman policier que ma mère a tapé à la machine et que l'un de mes frères a illustré. Je le conserve toujours, comme une relique. J'ai ensuite "fondé" un journal intitulé le Petit Baigneur, rédigé à la main sur un cahier d'écolier en un exemplaire unique que je louais à la fratrie, aux voisins et amis. Avec l'argent ainsi collecté, j'achetais le prix destiné au lauréat du concours qui figurait dans le journal! Depuis, je n'ai jamais cessé d'écrire: romans, récits, poèmes, biographies, articles de presse, pièces de théâtre…
Le moule importe peu, pourvu que les idées puissent s'exprimer librement! L'écrivain est par définition un être libre. Cette liberté se manifeste à trois niveaux: liberté dans le choix du genre littéraire, liberté dans le choix du thème, liberté dans le choix de la langue. Chez moi, le choix de la langue française a été tout naturel: je suis tombé amoureux de cette langue, comme d'une femme. Cette "femme" est difficile, capricieuse, mais elle est d'une grande richesse intérieure. Toute langue est fille de son histoire: la langue française, "langue de la liberté" selon l'abbé Grégoire, est porteuse de valeurs auxquelles je ne pouvais rester insensible dans un monde arabe miné par l'extrémisme, les dictatures et le terrorisme intellectuel. Elle est aussi, à mes yeux, une passerelle capable de relier l'Orient et l'Occident à une époque marquée par la méfiance et l'incompréhension entre ces deux mondes pourtant complémentaires. La francophonie est pour moi, enfin, une vaste famille ayant une même langue et des valeurs communes en partage – encore que ces valeurs soient parfois bafouées par des régimes réfractaires à la démocratie. L'écrivain doit-il être engagé? Il doit être, sans doute, "en situation dans son époque" comme l'affirmait Sartre, mais il doit surtout défendre des idéaux, non des idéologies – dont l'histoire nous montre la précarité et les limites ■