Dans le cadre du Mois de la Francophonie, l’Association Nationale des Enseignants de Français du Liban (ANEFL), en partenariat avec plusieurs institutions éducatives, a organisé le samedi 15 mars une journée pédagogique sous le thème « L’enseignement du et en français au Liban au regard des compétences du XXIᵉ siècle : situations et perspectives
Cet événement organisé en collaboration avec l’école Saint Maroun des Sœurs Maronites de la Sainte Famille à Tripoli, la Représentation de l’OIF au Liban, l’Institut français du Liban (IFL) et le Centre de Recherche et de Développement Pédagogiques (CRDP), destiné aux enseignants et responsables éducatifs, vise à repenser les pratiques pédagogiques pour mieux préparer les élèves libanais aux défis d’un monde en constante évolution
L’événement a eu lieu le 15 mars 2025 à l’Ecole de Saint Maroun des Sœurs maronites de la Sainte-Famille à Tripoli
100 responsables et enseignants de et en français de différents établissements publics et prives y ont participé
Une Séance Inaugurale pour lancer la réflexion
La journée pédagogique a débuté par une séance inaugurale animée par Mme Anastasia El Aya, responsable pédagogique à l’École Saint Maroun des Sœurs Maronites de la Sainte Famille à Tripoli
Les allocutions d’ouverture ont été prononcées par Sœur Thérèse Marie Harika, directrice de l’école hôte, a exprimé son immense plaisir d’accueillir cette journée pédagogique au sein de l’École Saint Maroun des Sœurs Maronites de la Sainte Famille, un établissement ancré dans une tradition d’excellence éducative. Fondée sur les valeurs du Patriarche Elias Hoyek, l’école a toujours placé l’éducation au cœur du développement individuel et collectif, obtenant notamment le Label France Éducation en reconnaissance de ses efforts. Cette rencontre souligne la nécessité d’adapter l’enseignement du français aux défis contemporains, en intégrant des approches innovantes et en repensant les curricula. Au terme de son allocution Sœur Thérèse Marie Harika a remercié l’Anefl en la personne de sa présidente Mme Bouchra Baghdadi ADRA et les expert.e.s invité.e.s pour leur engagement et a mis en avant la collaboration importante entre l’ANEFL, l’OIF et l’Institut Français, afin de moderniser les pratiques éducatives et de promouvoir la francophonie au Liban
- M. Antoine Hoayek, directeur délégué de l’Institut Français de Tripoli
- M. Levon Amirjanyan, représentant de l’OIF (REPMO)
Les allocutions d’ouverture ont mis en avant l'importance de la francophonie dans l'éducation au Liban, la nécessité d’adapter l’enseignement aux défis contemporains, ainsi que l’importance des projets et des activités de formations mis en place par la présidente et les expertes de l’ANEFL dans les domaines de l’innovation des pratiques pédagogiques et des technologies éducatives
L’exposé de cadrage a été assuré par Mme Bouchra Baghdadi Adra, présidente de l’ANEFL et de la Commission du Monde Arabe de la FIPF, qui a introduit les grandes lignes de la journée avec une intervention intitulée « Enseignement du et en français et préparation des jeunes aux défis du XXIᵉ siècle ». Elle a souligné les mutations actuelles du monde éducatif et les stratégies nécessaires pour faire du français un atout pour les apprenants, en les préparant aux exigences du monde globalisé. Cette ouverture a donné le ton des échanges à venir, en inscrivant la réflexion dans une perspective d’innovation et de modernisation des pratiques pédagogiques
Une Table Ronde pour réinventer l'enseignement du Français au Liban
La table ronde de cette journée pédagogique a réuni des expertes issues de diverses institutions éducatives afin d’examiner les défis et les opportunités liés à l'enseignement du français et en français au Liban. Modérée par Pr. Wassim El Khatib, elle a mis en lumière des perspectives variées sur les compétences du XXIᵉ siècle, l’innovation pédagogique et l’intégration des nouvelles technologies dans l’apprentissage
L’intégration des compétences du XXIᵉ siècle dans l’enseignement du français
Pr. Hyam Ishac, présidente du Centre de Recherche et de Développement Pédagogiques (CRDP), a insisté sur l’importance d’une refonte des pratiques éducatives pour répondre aux exigences du XXIᵉ siècle. Dans un monde où la culture de base et la littératie numérique sont devenues essentielles, l’enseignement du français doit évoluer en intégrant des pédagogies actives, le numérique et des approches interdisciplinaires. Toutefois, un décalage persiste entre les méthodes traditionnelles et les besoins des apprenants d’aujourd’hui. Elle a présenté les initiatives mises en place par le CRDP, notamment la réforme des curricula qui vise à harmoniser compétences transversales et disciplinaires tout en adoptant des pratiques plus flexibles et adaptées aux réalités contemporaines
Enseignement du français et compétences transversales : entre défis et perspectives
Pr. Wafa Berry, experte en politique éducative et linguistique, a développé une réflexion autour des compétences du XXIᵉ siècle et leur intégration dans l’enseignement du français. Elle a analysé les obstacles actuels qui freinent cette intégration, notamment des méthodologies parfois rigides et une absence de formation continue adaptée aux nouveaux enjeux pédagogiques. Son intervention a proposé des exemples concrets d’intégration des compétences transversales dans les pratiques de classe, mettant en avant l’importance de la créativité comme moteur de l’apprentissage. En conclusion, elle a présenté des pistes d’amélioration pour favoriser une approche plus dynamique et efficace de l’enseignement du français
Briser les frontières disciplinaires : une approche holistique de l’enseignement
Pr. Ass. Sonia Constantin, spécialiste en didactique des disciplines non linguistiques (DNL), a abordé la nécessité d’adopter une approche interdisciplinaire dans l’enseignement du français. Son intervention a mis en évidence l’évolution des pratiques pédagogiques du XIXᵉ au XXIᵉ siècle et souligné l’urgence de repenser l’éducation comme un espace d’alliance entre les disciplines. En intégrant la pensée complexe et la reliance, elle a proposé des stratégies permettant de former des citoyens capables de comprendre les interconnexions mondiales et d’agir face aux enjeux systémiques actuels. L’accent est mis sur la pensée critique, l’empathie et la résilience comme compétences fondamentales dans la construction d’une citoyenneté mondiale et d’une responsabilité partagée
L’intelligence artificielle à l’école : entre innovation et éthique
Dr. Aïda El Soufi, experte en technologies éducatives, a interrogé l’impact de l’intelligence artificielle sur l’apprentissage et la pédagogie. Elle est revenue sur la nécessité de redéfinir certaines notions comme le plagiat et la triche, en les adaptant aux nouvelles réalités du numérique. En s’appuyant sur une adaptation de la taxonomie de Bloom, elle a démontré comment l’IA peut être un levier pour renforcer l’apprentissage et l’évaluation, tout en soulignant les compétences humaines qui restent essentielles. Son intervention a introduit également le modèle participatif-passif (PPai6), qui définit différents niveaux d’engagement des apprenants vis-à-vis de l’IA, et a proposé une grille d’évaluation pour guider une utilisation critique et efficace de l’IA en classe
Perspectives internationales sur la politique linguistique éducative
Pr. Jean-Claude Beacco, professeur émérite à la Sorbonne Nouvelle, a clôturé la table ronde en apportant un éclairage international sur les politiques linguistiques éducatives. Il a analysé les tendances actuelles en matière d'enseignement du français et proposé des recommandations pour adapter l’éducation francophone aux réalités du XXIᵉ siècle et aux compétences de vie. Son intervention a visé à inscrire la réflexion dans un cadre plus large, en mettant en avant les défis liés à la diversité linguistique, aux politiques éducatives et à la place du français dans un monde en mutation
Un débat pour transformer l’éducation
Cette table ronde a constitué un moment fort de réflexion et d’échange, où chercheurs, enseignants et responsables éducatifs ont pu confronter leurs idées et proposer des pistes concrètes pour un enseignement du français plus moderne, inclusif et en phase avec les exigences du XXIᵉ siècle
Des ateliers pour passer de la théorie à la pratique
Afin de concrétiser ces réflexions, trois ateliers ont été proposés aux participants
• Pratiques pédagogiques innovantes pour former un citoyen éclairé, animé par Rima Abdel Fattah Mobayed
• Enseignement innovant des DNL : Briser les frontières disciplinaires pour un citoyen engagé, dirigé par Sonia Constantin
• Intégration de l’IA dans l’enseignement : outils, enjeux et défis, encadré par Aïda El Soufi
Ces ateliers ont offert des pistes concrètes pour intégrer des approches pédagogiques innovantes et favoriser la formation d’apprenants autonomes, critiques et responsables
Un engagement pour l'avenir au service de l’Éducation francophone
Cette journée ne se veut pas seulement un moment d’échange, mais un véritable laboratoire d’idées pour faire du français un levier d’émancipation et d’opportunités pour la jeunesse libanaise. En réunissant experts, enseignants et décideurs, l’événement a ouvert la voie à une éducation plus dynamique et tournée vers l’avenir pour repenser l’enseignement du et en français au Liban. Face aux défis du XXIᵉ siècle, l’éducation francophone doit évoluer pour offrir aux apprenants des outils leur permettant de s’intégrer pleinement dans un monde globalisé. Loin d’une approche figée, cet événement favorise l’émergence de nouvelles stratégies pédagogiques adaptées aux réalités socioculturelles et technologiques contemporaines
En mobilisant des spécialistes de divers horizons – didactique des langues, disciplines non linguistiques, technologies éducatives et politiques linguistiques, cette rencontre a permis d’identifier les freins existants et d’explorer des solutions innovantes. L’accent est mis sur des pratiques éducatives engageantes, intégrant les compétences du XXIᵉ siècle : pensée critique, créativité, collaboration et littératie numérique. L’objectif est de faire du français non seulement une langue d’apprentissage, mais aussi un vecteur d’émancipation intellectuelle et professionnelle pour la jeunesse libanaise
Cette dynamique collaborative ouvre la voie à une éducation plus interactive, inclusive et tournée vers l’avenir, où l’enseignant devient un facilitateur d’apprentissage, capable d’accompagner les apprenants dans la construction de savoirs interdisciplinaires. En plaçant l’innovation et la coopération au cœur des débats, cette journée pédagogique constitue un jalon essentiel dans la refonte des pratiques éducatives francophones, afin d’assurer aux nouvelles générations un accès équitable à une éducation de qualité, adaptée aux enjeux de demain